« Après avoir passé 5 ans au Canada et être allé à plusieurs reprises aux Etats-Unis, j’ai vraiment été étonné que ça n’existe pas en France. Pour moi c’est un non-sens ». Quoi ? Le doggy bag ou sac à emporter qui consiste à récupérer les restes de ses plats au restaurant. De retour en France Laurent Calvayrac, jeune entrepreneur, a donc décidé de lancer la fabrication et la commercialisation pour les restaurateurs de sacs 100% respectueux de l’environnement et 100% fabriqués en France visant à développer le doggy bag en France. « L’idée, c’est de participer à la lutte contre le gaspillage alimentaire et d’apporter une solution aux problèmes de gestion des déchets », explique-t-il. Le principe est de proposer sa boite « trop bon pour gaspiller » aux restaurateurs qui seront ensuite identifiés grâce à un visuel en vitrine. Le prix de cet emballage sera ensuite partagé entre les consommateurs et les professionnels. Pour l’instant, une vingtaine de restaurants dans sa région, en Rhône-Alpes, se sont déclarés intéressés.
« J’ai l’impression que chez nous cela fait radin de le réclamer »
En France les données chiffrées sur le doggy bag manquent, mais si les restaurateurs qui proposent d’emballer vos restes sont rares, ils s’y plient volontiers si le client le demande. Et ils sont de plus en plus nombreux à le faire, si bien que cette pratique commence à rencontrer un certain écho. Ainsi, le gouvernement lui-même dans le cadre de son Pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire encourage les professionnels de la restauration à développer le doggy bag. Du côté des consommateurs le constat est le même. « C’est quelque chose qui se fait beaucoup dans les pays anglo-saxons et qui est vraiment pratique. En France, je ne sais pas si les restaurateurs sont pour ou contre mais je suis toujours gênée de le demander. J’ai l’impression que chez nous ça fait radin de le réclamer et j’ai peur d’être mal vue », raconte Lysa, parisienne d’une trentaine d’années. Pour expliquer cette différence de mentalité, on met souvent en avant la différence entre les proportions américaines souvent très importantes et celles françaises qui incitent, dans notre pays à finir nos assiettes. « Il y a aussi un aspect culturel, qui sacralise peut-être plus la nourriture et le repas en France. Ici, on est élevé dans l’idée qu’il faut finir son assiette. C’est moins le cas aux USA », expliquait récemment dans Le Monde Anne Lhuissier, sociologue à l’INRA.
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Du côté des restaurateurs aussi les mentalités évoluent. Si certains s’y sont mis face à la demande de leurs clients, d’autres trainent encore. « C’est surtout le cas d’établissements de qualité qui ont peur d’abimer leur image de grande cuisine en proposant ce service et en distribuant les restes », détaille Laurent Calvayrac lui-même en discussion avec plusieurs grands restaurants dans la région Rhône-Alpes pour proposer sa boîte « trop bon pour gaspiller ». Au sein du Syndicat national de la restauration thématique et commerciale, on met en avant une autre raison. Pour Dominique Bénézet son directeur général : « C’est quelque chose qu’on n’encourage pas principalement pour des raisons sanitaires et d’hygiène. Les plats sont préparés par des professionnels pour être mangés tout de suite. Alors quid des risques microbiens lorsque la nourriture sera emmenée ? Qui sera responsable s’il y a ensuite des problèmes de conditionnement et que la nourriture rend malade ? ». Se pose aussi la question du prix des emballages proposés mais comme l’explique Laurent Calvayrac : « Les sondages que j’ai commandé me confortent dans l’idée de développer cette pratique. Les consommateurs en sont demandeurs, parce que cela se fait pour le vin, mais surtout parce que nous sommes de plus en plus sensibilisés à la question du gaspillage et des déchets. Et emporter ses restes au lieu de les jeter, ce n’est vraiment que du bon sens ».
Juien Auduc
Photo : DR
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